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Film streaming Certaines Femmes 2160p

Certaines femmes

Quatre magnifiques portraits de femmes sublimés par des actrices d’exception.

Qu’est-ce que ce long train qui ouvre Certaines femmes, traversant son premier plan,

déchirant l’écran à un rythme languissant –ce rythme des trains de marchandises, à la

fois bruyant et atone–, et dont l’écho lancinant résonnera tout au long du sixième long

métrage de la plus singulière des cinéastes américaines? Quittant les espaces de l’Oregon

que Kelly Reichardt avait explorés dans ses précédents films –Old Joy (2006), Wendy et

Lucy (2008), La Dernière Piste (2010) et Night Moves (2013)– Certaines femmes prend place

dans une ville enclavée et isolée, dans le sud du Montana. Vont s’y dérouler, adaptées de

plusieurs nouvelles de l’écrivaine Maile Meloy, quatre histoires de femmes présentées de

manière séquentielle, comme autant de blocs ne se chevauchant qu’au hasard de rares

rencontres. Quatre histoires donc, difficilement saisissables, tant leurs trajectoires

s’apparenteraient à la chute d’une feuille d’arbre baladée par un vent d’automne. Chacun

des personnages des oeuvres antérieures de Reichardt suivait un parcours à la fois

géographique (une promenade en forêt, une traversée des Etats-Unis à pied ou en

roulotte) et intérieur, lié à sa propre survie dans une société marginalisant les laissés-pourcompte.

S’éloignant de cette démarche, Certaines femmes reprend l’immobilisme

mouvementé des activités écologistes de Night Moves mais en radicalise l’épure narrative

en se dégageant nettement de toute dramaturgie ostensible…

[…] Filmé en 16mm, Certaines femmes prouve encore une fois l’extrême rigueur du travail

de la cinéaste, dévoilant une capacité à rendre palpitants des gestes a priori banals. Il faut

revoir ainsi chaque séquence comme autant de captations lumineuses de dévoilements

d’espaces, jouant sur des profondeurs de champ ou des renversements de perspective,

avec un sens du montage qui convoquerait Robert Bresson pour l’attention portée au

toucher comme rapport poétique au monde, par exemple –Kelly Reichardt sait

admirablement filmer les mains et leur contact avec un être humain, un animal ou un

élément naturel. De ce travail d’orfèvre resplendit une infinie délicatesse et une

bienveillance dénuée de tout cynisme, qui finissent de consacrer Certaines femmes

comme l’une des oeuvres les plus précieuses vues récemment. Morgan Pokée

La Septième Obsession n°8, janvier-février 20